Et la boucle se boucle mais lui ne se la boucle pas et heureusement : Irtimid !!
Ce matin, un lapin a peut-être tué un chasseur dans les campagnes
espagnoles. Je n'écris pas ça parce qu'hier nous vîmes des œuvres de Goya, je
sais faire la différence entre la chanteuse à texte et le peintre. Si un lapin
a tué un chasseur, c’est qu’il avait un fusil. C’est donc qu’il en a acheté un.
C’est donc qu’il avait un permis de port d’armes. C’est donc qu’on le lui a
donné. C’est donc qu’un agent de la fonction publique espagnole est de mèche
avec les lapins. C’est donc que l’Espagne devrait être envahie par des lapins
d’ici la fin 2014. Vous pouvez toujours ricaner, nous vous aurons prévenu, moi
et Aristote.
Ce matin était le dernier du chasseur, donc, mais aussi du séjour à Madrid
pour Saudie et Myst. C'était donc pour eux le moment de ranger leurs affaires,
valises, sacs, et autres gels douches. Un grand moment de sport et d'humanité,
et un grand coup de pied dans le préjugé tenace selon lequel les individus de
sexe féminin auraient un sens du rangement plus développé. En effet, tandis que
les bagages de Myst ainsi que les miens auraient fait pâlir d'envie tout
amoureux de l'ordre, ceux de Saudie auraient fait fuir sur ses deux jambes un
habitant unijambiste de Capharnaüm. Saudie, Jésus au féminin ? L’hypothèse
vaudrait le coup de créer un nouveau courant religieux. Je me propose en toute
logique et modestie d’en être le Chef, le Grand Gourou, le Maestro, le Big
Boss, le Patron, le Grand Mufti, le Grand Muesli, appelez ça comme vous voulez
et profitez-en parce que pour ce qui est de la démocratie je garantis rien.
Vous pouvez cependant voter, en commentaire de ce blog, avec le choix
suivant : vote pour moi / vote blanc. Le vote blanc, comme en France,
n’étant bien entendu pas comptabilisé. Il l’est en Espagne ? Oui, mais c’est
moi qui fixe les règles de l’élection, j’en ai eu l’idée, un point c’est tout.
Le_neptunien n’étant pas, lui, en vacances, il avait ses cours habituels en
matinée. Nous le rejoignîmes donc près de son école un peu avant midi. En bus,
en métro, en fusée ? Oh que non : à pied ! Portant et faisant
rouler nos valises, nous trois chevaliers de l’ordre du tourisme cavalâmes de
nos jambes déjà meurtries par les promenades piétonnes ou cyclistes. Quelle
fougue nous anima, quelle aisance nous eûmes, quelle fière destinée semblait
s’inscrire en lettres d’or par-dessus nos têtes bringuebalant avec élégance,
quelle splendeur nous donnâmes au français par-delà nos frontières ! Et
quel hypocrite je fais, moi qui traînais ma peine inexistante en battant le
pavé madrilène avec la discrétion d’un éléphanteau, sans compter le bruit que
faisait mon hippopotame. Oui, c’est ainsi que je surnomme mon sac de voyage,
auquel je rends hommage car il nous supporte depuis des années, moi et mon
désordre Saudien. Ce dernier adjectif, je viens de l’inventer et de le
breveter, et 10€ me seront reversés à chacune de ses utilisations. Si je
traînais moi aussi mon sac, c’est que je quittai l’Hostal Oliver pour
m’incruster 2 nuitées durant chez la logeuse du Neptunien qui a eu la
gentillesse de me préparer un lit
Le temps étant plus frais que les jours précédents, cette marche dans les
rues et avenues de la capitale eut le mérite de nous garder au chaud. Elle nous
permit aussi de croiser une manifestation d’immigrés avec un slogan qui fut
traduit approximativement de l’espagnol par mes soins. Mes soins, qui coûtent
10€ eux aussi - je ne vois pas pourquoi les immigrés auraient droit à mes soins
gratuits puisque je fais payer tout le monde. Ce slogan, donc :
« Immigrés, pas fraudeurs ». Mais, mais, pourquoi donc les exilés
français en Suisse sont-ils venus manifester à Madrid ?
Arrivés près de l’école du Neptunien nous y entrâmes et nous y posâmes. Me
tournait alors dans la tête une idée de chanson, la faute à Saudie qui a le don
de sortir des phrases beaucoup plus rythmiquement organisées que ses bagages.
Le_neptunien terminant ses cours sortit comme tous les jours sous la haie
d’honneur de ses camarades et de ses professeurs, époustouflés par son talent
et par l’absence de fautes d’orthographe sur son blog. Il nous emmena manger
des tapas dans un petit restaurant non loin de là, l’Aránzazu, qui n’est pas du
tout la propriété de Bixente Lizarazu (ceci est la blague de quelqu’un ayant à
la fois commencé et arrêté de suivre le foot en 1998, le temps d’une Coupe du
Monde). Un restaurant dans lequel les étudiants de l’EF Madrid ont des
réductions. Qu’on se rassure, ce ne sont pas ces viles considérations
pécuniaires qui ont justifié le choix de ce restaurant mais bien la qualité des
tapas et la proximité.
Proximité, car il fallait ensuite aller jusqu’à l’aéroport pour y larguer
Saudie et Myst qui partaient donc retrouver la grisaille francilienne, les
klaxons en pagaille, l’incivilité chronique mais aussi un taux de chômage un
peu moins important, faut bien compenser. Leur avion devait décoller à 15h45,
nous prîmes donc deux bonnes heures d’avance. Un peu plus, au départ, mais
comme nous ratâmes lamentablement l’arrêt de bus du Terminal 1 de l’aéroport et
finîmes au Terminal 4, il nous fallut récupérer la navette interne de l’aéroport
pour retourner au 1. Une ultime péripétie en guise de cerise sur le gâteau pour
nos 2 joyeux tourlourous qui partirent le cœur vaillant, léger et plein de
soleil, retrouver la grisaille francilienne. Oui, je sais pertinemment que je
l’ai déjà écrit. Simplement j’aime retourner le couteau dans la plaie. Et pas
que la plaie du chasseur tué par le lapin.
Madrid Barajas est un aéroport parfaitement quelconque. Si tant est que
puisse être parfait ce qui est quelconque puisque si quelque chose est parfait,
il devient par là même particulier, remarquable au sens premier du terme. Donc
pas quelconque. L’expression « parfaitement quelconque » est donc un
brin oxymorique. Comme en Oxymorique un petit village Rigaulois résiste encore
et toujours à l’envahisseur - Premierdegréus – mettons que cette expression est
malgré tout acceptable et revenons-en, dis-je alors que je suis tout seul, au
propos. Madrid Barajas étant quelconque, seuls nos déchirants adieux dont l’évocation
m’écorche l’âme autant que le cœur seraient intéressants à conter. Je pourrais
ainsi vous citer Gaston Miron qui écrivit « C'est un
peu de nous tous en celui qui s'en va et c'est en celui qui naît un peu de nous
tous qui devient autre », mais comme personne dans notre entourage
madrilène n’est venu au monde cela serait alors hors-sujet. Ce qui signifierait
que j’aurais placé cette phrase uniquement comme caution littéraire à ce texte ? Quelle idée !
Dernier des Mohicans aux côtés du Neptunien, nous
rejoignîmes son école puis son « chez lui » pour déposer mon
hippopotame qui commençait à renâcler autant que mes mollets à forcer de tâter
le sol de Madrid. L’après-midi fut donc davantage mis à profit pour repos et
flânerie sans but précis que pour continuer la visite de la ville savamment
guidée par Le_neptunien.
Le dîner se passa avec la logeuse du neptunien et devant un téléviseur,
chose inhabituelle pour moi qui goûte davantage la compagnie des pans de mur.
Ces derniers possèdent l’immense avantage de ne pas bouger ni faire de bruit et
de laisser ainsi à mon vacarme intérieur toute la place qu’il réclame. Le tout
au grand dam de la partie raisonnée de mon cerveau. Toujours est-il qu’à la
télévision était diffusé un documentaire anglais, doublé en espagnol, sur la
famille royale anglaise, que Le_neptunien commentait en espagnol avec sa
logeuse et en français avec moi dans une gymnastique remarquable. Pendant ce
temps je m’accrochais à chaque mot prononcé en espagnol comme à une bouée
glissante risquant à tout moment de s’échapper de mes mains tendues.
Je ne me
noyai cependant pas et cela me permet d’écrire ces lignes en remerciant
Le_neptunien de m’avoir prêté, ainsi qu’à nos camarades désormais disparus – de
Madrid - un espace sur son blog. Un espace gratuit, donc je ne suis pas
responsable, pour raconter toutes mes âneries avec toute la prétention dont je
suis capable sans effort, le tout alors que le temps ensoleillé ne se
rafraîchit pas assez vite pour gâcher la douceur des journées. ¡ Que felicidad !
Je caresse, à défaut d´autre chose, l´espoir que notre cher Irtimid, ébloui par ton exemple, se lance lui aussi dans l´écriture d´un blog. J´aurais ainsi de quoi lire pendant les longues soirées d´hiver qui approchent, et de quoi rire ou sourire malgré la morne grisaille
RépondreSupprimerTropi
Attends son récit de ce jour ! Probablement court mais avec un vrai et grande surprise pour toi !! Quant au blog, je le laisse répondre directement :)
SupprimerJe vote pour ! A condition que le nom utilisé soit Grand Schtroumpf :)
RépondreSupprimerAu fait, "Tourlourous" il est pas breveté celui-là ?
Sinon, j'attends ta chanson, meme si tu fais ce que tu veux...
Comme d'habitude un grand bravo pour ton texte et un enorme merci pour m'avoir fait sourir autant là-bas avec tes ânnerie (encore un animal !) qu'ici dans ma grisaille parisienne.
@Tropianonyme: Il se trouve que je viens de démarrer un blog, encore très en rodage - cliquer sur mon pseudo pour y accéder... Les grands esprits se rencontrent ?
RépondreSupprimer@Saudie: Disons que "Tourlourous" est libre de droits. La chanson aussi, mais rien que pour toi ! Et c'est plutôt à moi de te remercier de sourire à ces âneries !